Ministre de la santé et des services sociaux du Québec, le docteur Rochon est considéré comme l'un des instigateurs du système de santé canadien et plus spécifiquement de celui du Québec, l'un des systèmes publics les plus progressistes au monde. Après une carrière universitaire remarquable, il a occupé des positions séniors au sein de l'Organisation Mondiale de la Santé. Son oeuvre est généralement reconnue comme ayant exercé une influence importante dans la décision de plusieurs pays de placer santé publique au coeur de la réforme de leurs systèmes de santé.
Directeur de Centre de promotion de la santé, Université de Toronto, Irving Rootman a poursuivi une brillante carrière dans la fonction publique canadienne où il a contribué, entre autres, à placer la promotion de la santé au coeur des préoccupations sociales et sanitaires du Gouvernement du Canada. De son poste actuel à l'Université de Toronto, il contribue à consolider le Mouvement pour la promotion de la santé au Canada et préside le Groupe de Travail de l'OMS sur l'Evaluation en promotion de la santé.
Victor Rodwin est reconnu internationalement comme expert en étude comparée des systèmes de santé. Il enseigne à la Robert F. Wagner Graduate School of Public Service de l'Université de New York.Ses voyages à travers le monde lui ont permis de montrer comment les différents types de gouvernement relèvent le défi d'offrir les meilleurs soins de santé à leur population. Pour le docteur Rodwin, la comparaison des systèmes de santé est complexe et ne vise aucunement à prouver la supériorité d'un système sur l'autre. Au cours de cet entretien, il décrit avec enthousiasme et humour les principaux enjeux méthodologiques de son champs d'étude et montre, à l'aide de nombreux exemples, comment les modèles théoriques résistent mal aux contraintes politiques et culturelles. Il aborde aussi la difficulté d'exporter des politiques de santé qui peuvent s'avérer judicieuses dans un contexte mais néfastes dans un autre.
Alexandre Berlin, conseiller pour la santé publique à la Commission européenne de la santé, nous décrit le contexte dans lequel évolue la Comission européenne de la santé et la place qui est dévolue à la santé publique. L'Europe confrontée de façon permanente à d'énormes changements sociaux et politiques, doit constamment inventer de nouvelles manières d'aborder la santé afin de la maintenir au coeur des priorités des pays membres. Le docteur Berlin nous décrit, avec quelques exemples à l'appui, certaines stratégies pour mettre de l'avant des programmes de sensibilisation et de prévention qui pourront intéresser un grand nombre de pays et être diffusés largement.
Alain Dubuc, économiste et éditorialiste en chef au journal La Presse à Montréal, s'intéresse à la santé par le biais de l'économie politique. Au cours de cet entretien, il aborde la santé de l'extérieur, pour en faire une sorte d'examen clinique utilisant une méthodologie quasi médicale. C'est l'économie qui malheureusement détermine les réformes de santé, dit-il, alors que la santé aurait besoin d'évoluer au nom d'autres valeurs comme les nouvelles connaissances, les développements de la technologie ou la nouvelle compréhension des déterminants sociaux. Il résulte de cette dynamique économique plusieurs distorsions qui sont abordées ici sans ambages. Les décideurs sont-ils seuls responsables de l'état actuel du système ? Les citoyens désirent-ils vraiment adopter une attitude de participation active nécessaire au passage à un nouvel ordre des choses ? Alain Dubuc ose souligner l'étonnante complicité en faveur du statu quo. Par quoi peut-on remplacer une situation qui convient si bien à tous les acteurs ? Il tente aussi d'identifier les lignes de forces qui vont sous-tendre les systèmes de santé de l'avenir. Il parle d'un rôle moins teinté d'angélisme pour la santé publique, d'une participation de la population éclairée par les technologies de l'information. Il évoque aussi la transformation inévitable des professions de la santé. Enfin, il s'inquiète de l'incapacité de l'Etat à véritablement évoluer en matière de santé et aborde la délicate question de la privatisation des soins de santé.
Directeur de la Division de la Promotion de la Santé, de l'Education et des Communications, Organisation Mondiale de la Santé, Genève, Madame Kickbush est à l'origine de la Charte d'Ottawa pour la promotion de la santé et de la déclaration de Jakarta, deux éléments fondamentaux dans la construction de la Nouvelle Santé Publique. Elle joue un rôle de premier plan dans le façonnement des politiques sanitaires au niveau international. Tous lui reconnaissent un rôle d'ambassadeur de la Nouvelle Santé Publique.
Directeur du " International Centre of Health and Society" de l' University College à Londres, cet épidémiologiste de renommée mondiale a été le chercheur principal des Etudes de Whitehall (études de cohortes des fonctionnaires britanniques) dont les résultats ont façonné notre pensée relativement à la question des déterminants de la santé et au rôle que joue la perception d'agir "empowerment ". Il s'est aussi intéressé à la question de la diffusion des connaissances scientifiques et à l'influence de la pensée scientifique sur le développement des politiques sanitaires et sur le comportement humain.
Marc Danzon a été délégué général du Comité Français d'Education pour la Santé. Il a occupé par la suite le poste de Directeur du Bureau de l'Europe de l'OMS pour la promotion de la santé. Il a été Responsable de la santé publique à la Mutualité Française. Dans cet entretien, Marc Danzon se demande si les pays de l'Est importent présentement ce qu'il y a de mieux ou de pire dans les systèmes de santé occidentaux. Comment la nouvelle santé publique devrait-elle intervenir dans ces transferts de connaissances et de technologie ? Comment envisager les réformes des systèmes de santé dans le contexte des profonds bouleversements économiques et politiques qui ont accompagné la chute du mur de Berlin. L'échange avec Marc Danzon vient éclairer cet important débat et refléter certaines contradictions qu'il ne faut plus passer sous silence.
Directeur de l'Ecole de Santé Publique de Nancy, le Professeur Deschamps est un pionnier de la santé publique française et l'un des maîtres à penser de toute une génération de professionnels de la santé publique. Son influence s'est fait sentir dans plusieurs domaines notamment celui de l'établissement de priorités nationales de santé. Lors de son mandat à titre de Président du Comité Français d'Education pour la Santé, la principale structure de promotion de la santé de ce pays, Jean-Pierre Deschamps a créé des réseaux de centre départementaux dont le rôle dans l'action locale et dans la diffusion est largement reconnu.
Dans cet entretien, le docteur Huerre, psychiatre et directeur de la Fondation Santé des Etudiants de France, interpelle les professionnels de la prévention en leur demandant de faire éclater certains de leur à priori. Il incite à appréhender l'adolescence dans sa globalité afin de ré-installer la demande dans le temps, au-delà de l'urgence et du fait-divers. En donnant la parole à l'adolescent, on comprend que les situations sont toujours plus complexes que prévues et qu'il faut tenir compte de l'ensemble des facteurs scolaires, économiques, familiaux ... Les jeunes ont besoins qu'on porte sur eux un regard positif et qu'on s'intéresse à ce qui les préoccupe vraiment : l'amour, le bonheur, l'avenir...
Le docteur Paccaud, directeur de l'Institut Universitaire de Médecine Sociale et Préventive de Lauzanne, critique le rôle un peu éffacé que joue la santé publique dans les différentes réformes de santé qui ont cours actuellement dans le monde occidental. Une réforme peut être axée sur les besoins de la population ou sur la demande de soins et la réponse à cette demande. Force est de constater que la plupart des réformes des systèmes de santé sont conduites par les payeurs, moins préoccupés par les besoins de la population que par la demande de ceux qui règlent les primes. Que ce soit en intervenant localement ou dans les pays en voie de développement, la santé publique doit faire de l'activisme social. On doit redonner à la santé publique son sens de l'engagement.
Michel Clair connaît les rouages de la consultation publique. Ce politicien chevronné a été quatre fois ministre dans le gouvernement du Québec, puis devenu vice-président d'Hydro-Québec, c'est donc sans grande surprise, que le rapport de la commission d'études sur les services de santé et les services sociaux, publié au début de 2001, fut si favorablement accueilli. Chaque joueur impliqué dans le système de santé et des services sociaux semble y retrouver une idée ou une recommandation en ligne avec ses aspirations. Arriver à un tel niveau de consensus dans un environnement aussi complexe n'est pas une mince affaire. Le rôle central de la prévention fait l'objet de considérations particulières tout que celui de l'intégration horizontale des services de santé et des services sociaux.
Professeur à la " London School of Hygiène and Tropical Medicine " et président de l'Union International de promotion de la Santé et de l'Education pour la Santé, le professeur Hagard est l'une des autorités mondiales de la Charte d'Ottawa pour la promotion de la santé et de son implantation dans les politiques sanitaires de divers pays. Il est aussi reconnu comme Conseiller International en matière de réforme des système de santé.
Le docteur Abenhaim est un médecin épidémiologiste qui a dirigé pendant plusieurs années un important Centre de recherche en épidémiologie et en santé publique à l'Université McGill. Devenu Directeur Général de la Santé de France, il se retrouve au centre du système de santé et est chargé, à ce titre, de déterminer les priorités générales de santé publique et les grandes orientations dans l'offre de soins y compris la compétence des médecins et les normes de pratiques. Dans cet entretien, Lucien Abenhaim aborde sans ambages les grandes questions de santé qui interpellent actuellement la plupart des pays occidentaux : modification des rôles des principaux acteurs du champ de la santé, participation de plus en plus grande de la population au processus décisionnel, influence de l'opinion publique et des médias dans l'évaluation du risque, nécessité de communiquer directement avec la population, etc. Comparant l'Europe à l'Amérique, il traite de sujets comme le principe de précaution, l'importance des grandes écoles de santé publique, le transfert des connaissances et le rôle déterminant de l'internet dans l'évolution des pratiques.