Dans la vie, Antonin Artaud était comme sur scène: furieux, terrifié, paroxystique. Son oeuvre poétique et théâtrale possède ce même caractère extrême et reflète un esprit torturé, un moi fragmenté, en quête d'incarnation. Il exorcise par une écriture-cri une réalité qui lui échappe. Jeune, Antonin produit deux livres qui dérangent les hommes, qui sont "comme une porte ouverte qui les mène là où ils n'avaient jamais consenti à aller": "L'Ombilic des Limbes" et "Le Pèse-Nerfs". Il y crée une nouvelle rhétorique qui transcrit ses "états innombrables" et sa douleur. Celle-ci aura raison de lui: il sera interné en 1939. Antonin Artaud, désespéré, remplit 406 cahiers en trois ans... Artaud est-il mort avant d'être né? L'hypothèse irrigue le documentaire d'André S. Labarthe qui conduit avec brio le théâtre cruel de la vie d'Antonin et célèbre le poète, révolutionnaire de l'art et de la vie.
Lieu de vie et de soin, La Borde reste une référence unique dans la conception et la prise en charge de la folie. C’est aussi le lieu où la réalisatrice a passé son enfance, à la garderie avec les enfants des soignants. « Lorsque je reviens dans ce paysage familier, je reconnais une musique singulière portée par des mots, mélodie d’un dialecte local. En explorant le "Ritz", "le poulailler", "l’orangeaccueil", ce sont les lieux qui se mettent à raconter ce qui ne cesse de s’inventer dans cet espace incroyablement vivant. »
CHUT... CHUT, CHÈRE CHARLOTTE (HUSH... HUSH, SWEET CHARLOTTE) Fiction (2h13)
Réalisateur :
Robert Aldrich Pays :
Etats-Unis
- 1964
Prix Edgar-Allan-Poe 1965 du meilleur scénario
En 1927, en Louisiane. Lors d'une réception, la jeune Charlotte Hollis apparaît devant les invités couverte de sang. John Mayhew, son amant,vient d'être assassiné. Charlotte et John étaient sur le point de s'enfuir, loin de l'autorité d'un père possessif et de la jalousie d'une épouse. Des années plus tard, en 1964, Charlotte vit toujours dans la somptueuse propriété qui a été le théâtre du drame. Charlotte devenue la risée des habitants est considérée par tous comme folle. Celle-ci est menacée d'expropriation car un pont doit être construit à l'emplacement de son manoir. N'entendant pas se laisser faire, elle fait appel à sa cousine Miriam Deering. Miriam, bienveillante au premier abord perd peu à peu son amabilité et laisse apparaître de vieilles rancœurs. Avec l'aide du Docteur Drew Bayliss, celle-ci a en fait des intentions bien peu honorables : rendre sa cousine folle et empocher une belle somme d'argent.
Regard sur la justice, le crime, la psychiatrie... Un jour, ils sont passés à l'acte criminel et le diagnostic du "trouble mental grave" les a envoyés dans un établissement de défense sociale: prison pour fous ou asile pour criminels. L'émission tente de lever le voile sur ces hommes. Quel a été - ou quel est - leur problème mental? Pourquoi sont-ils passés à l'acte? Comment les soigne-t-on? Des reportages et les témoignages d'internés, de thérapeutes, de gardiens, ou de victimes alimentent le débat et permettent de faire évoluer l'opinion publique sur l'irresponsabilité, la folie, et le crime de fou.
"La maladie, la folie et la mort sont les anges noirs qui ont veillé sur mon berceau à ma naissance", disait Edvard Munch (1863-1944). Très tôt marqué par la mort et la folie, ces thèmes sont récurrents dans l'art du peintre norvégien. Sa mère et une de ses soeurs meurent alors qu'il est encore enfant. Sa deuxième soeur sera atteinte de folie. Munch vit alors dans l'angoisse de ce lourd destin familial et prendra le pinceau pour exprimer son tourment. Son art est intimement lié à son histoire personnelle. Evitant les normes de représentation et de montage des films biographiques, Peter Watkins a ajouté des éléments très personnels et subjectifs à cette biographie des jeunes années de Munch, aux prises avec les conventions et le puritanisme de son époque. Par un montage audacieux, revisitant les techniques documentaires et narratives, Watkins pousse un "cri" personnel autant qu'il dresse le portrait de l'artiste et de son milieu. Considéré par beaucoup comme un des très rares films autobiographiques de qualité, "Edvard Munch" est sans doute la meilleure oeuvre jamais consacrée à l'acte créatif et à la peinture. Un chef-d'oeuvre, réalisé à l'époque pour la télévision suédoise et projeté en avant-première dans sa version cinéma.
Louis II de Bavière a vécu sa psychose pendant quarante ans sans trop de difficultés. Bien que les indices de sa maladie devinrent de plus en plus évidents, le diagnostic de psychose fut longtemps réfuté par plus d'un de ses familiers. Sa psychose se déclencha à la mort de Richard Wagner et ensuite, plus radicalement, lorsque l'état catastrophique de ses finances l'obligea à interrompre la construction de ses châteaux aussi coûteux qu'apparemment inutiles. Le film-vidéo de P. de Neuter et Ph. Meremans propose dans une première partie un exposé aussi fidèle que possible de la biographie du roi, journal intime du roi et documents d'époque à l'appui. Dans sa seconde partie, il rend compte, pour un large public, de la particularité de ce destin dans une perspective psychanalytique.
Depuis la Deuxième Guerre mondiale, les traitements psychiatriques ont beaucoup évolué: à l'enfermement hérité du 19ème siècle s'est substituée la volonté de réinsertion, tandis que le regard médical et social sur la folie évoluait. Ville-Evrard, en région parisienne, est un hôpital de santé mentale modèle, tel qu'on les concevait voici plus d'un siècle. Paul Muxel et Bertrand de Solliers donnent la parole à certains de ceux qui y ont vécu ou travaillé, retraçant ainsi la genèse de l'histoire psychiatrique occidentale.
DVD 1: "Histoires autour de la folie", première partie (107', 1993): Une traversée dans la mémoire vécue, des années 1920 aux années 1970, de l'ancien "Asile de Fous" à l'hôpital psychiatrique des années 1970/1980. Mémoires vivantes des conditions d'enfermements sans médicaments, jusqu'à l'arrivée des neuroleptiques. La période de la Seconde Guerre mondiale, fondatrice pour certains des transformations qui vont s'ensuivre, entraîne des changements. La psychiatrie se libère, change ses méthodes. Elle ouvre ses portes et décide de soigner dans la ville avec la "psychiatrie de secteur".
Compléments DVD: Esquisses préparatoires: Fermeture de la porcherie de Ville Evrard, 1989 (17') - Entre abandon et lieux de vie, images de préparation, 1990 (7') - - Filmographie des réalisateurs.
DVD 2: "Histoires autour de la folie", deuxième partie (104', 1993): Vingt ans plus tard, au début des années 1990. La notion d'asile a disparu, l'hôpital de jour devient le lieu de soins privilégié. De nouvelles pratiques d'accompagnement des patients se mettent en place pour une meilleure insertion dans la ville. Une question reste ouverte: la psychiatrie ne peut pas répondre à tous les maux entraînés par les transformations profondes d'une société qui engendre de nouvelles formes d'exclusion. La notion d'asile ayant disparu, le "fou" vit une autre sorte d'isolement, celle de sa différence - "l'inquiétante étrangeté de l'être" - à l'intérieur de la ville.
Complément DVD: Entretien avec Guy Baillon, psychiatre, 3 juin 2006 (25').
Note: Ce documentaire a obtenu de nombreux prix dans plusieurs festivals. Il est composé de 4 parties de 56 minutes chacune.
En regard de la psychose chez les adolescents, le Dr Raymond Cahn, dans un premier temps, nous fait part des enjeux auxquels est confronté l'adolescent : enjeux concernant son identité, son corps sexué et sa relation au corps social. Ensuite, il nous amène au cœur même de la problématique centrale qu'il qualifie de " catastrophe psychotique ". Il développe les concepts fondamentaux de liaisons /déliaisons et de reliaisons en attirant notre attention d'une façon particulière sur ce qu'il appelle les liaisons dangereuses. Enfin, concernant la question de l'adolescent psychotique, le Dr Cahn dégage des fonctions spécifiques pour l'institution, les soignants, et le thérapeute.
LA MOINDRE DES CHOSES Documentaire (1h45)
Réalisateur :
Nicolas PHILIBERT Pays :
France
- 1996
Grand Prix du public aux Rencontres Internationale du Cinéma à Paris 1996
Au cours de l'été 1995, fidèles à ce qui est désormais devenu une tradition, pensionnaires et soignants de la clinique psychiatrique de La Borde se rassemblent pour préparer une pièce de théâtre qu'ils joueront le 15 août. Le choix de cette année s'est porté sur l'Opérette de Witold Gombrowicz, une pièce troublante par les résonances particulières qu'elle offre avec l'univers de la folie. Au fil de répétitions, le film retrace les hauts et les bas de cette aventure. Mais au-delà du théâtre, il raconte la vie à La Borde, celle de tous les jours, le temps qui passe, les petits riens, la solitude et la fatigue, et puis aussi les moments de gaieté, les rires, l'humour dont se parent certains pensionnaires. Un film sur la folie ? Certainement pas. Sur la psychiatrie ? Encore moins ! Le théâtre ? Un prétexte... Plutôt qu' un film sur, j'ai fait un film avec et grâce à : avec des fous, et grâce à La Borde. Alors, s'il fallait en définir le sujet, je dirais que c'est un film qui parle de ce qui nous relie à l'autre, de notre capacité-ou incapacité- à lui faire une place. Et finalement, de ce que l'autre, dans son étrangeté "peut nous révéler de nous-mêmes " Nicolas Philibert Biblio : Interview Philibert in dossier de presse
Psychiatrie, folie, maladie mentale, des mots qui font peur et que l'on préfère réserver aux autres. Des mots qui impliquent ou qui impliquaient souvent enfermement, asile. Beaucoup de choses ont évolué ces trente dernières années (anti-psychiatrie, neuroleptiques, réflexion psychanalytique...) pour qu'on puisse dire qu'il existe aujourd'hui de réelles alternatives à l'hospitalisation psychiatrique. L' émission propose de redéfinir la psychiatrie au départ de documents d'archives (1962, 1971, 1990, 1991) qui sont commentés par un psychiatre et un psychanalyste. Ces derniers insistent sur l'importance de rétablir la communication là où il n'y en a plus quand la personne est en souffrance et qu'elle ne peut plus trouver de soutien dans son environnement social. Leur but est de montrer que tout un chacun peut éprouver à un moment de sa vie des problèmes existentiels qui n'impliquent pas pour autant la folie et que des lieux existent où l'on peut trouver une aide (centre de santé mentale, placement familial, psychothérapie, ...).
Mettant en images le Petit dictionnaire des idées reçues sur la folie et autres considérations, la réalisatrice Annie Frenette défait nos préjugés sur la santé mentale avec humour et poésie.
Les journaux de Lipsett" propose une descente dans le maelstrom des angoisses d'Arthur Lipsett, célèbre cinéaste expérimental canadien, mort à 49 ans. Épousant la forme du journal intime, ce film de Theodore Ushev nous entraîne dans les méandres de la maladie mentale, alors que se bousculent et s'entrechoquent les images et les sons évoquant l'enfance solitaire de l'artiste, sa frénésie créatrice et sa chute vertigineuse dans la dépression et la folie. Puisant, comme Lipsett le faisait, dans les archives d'origines diverses, recyclant même certains segments tirés des films du cinéaste, Ushev renouvelle son esthétique par l'utilisation de la peinture et du crayon sur papier qu'il traite numériquement. Le résultat est une oeuvre spectaculaire et audacieuse, un court métrage éclaté et éclatant, une plongée dans le tourbillon d'un esprit en déséquilibre. Fruit de la collaboration du cinéaste avec l'écrivain Chris Robinson, le film pose un regard singulier sur le génie tutoyant la folie.
En 1985, Marion Hänsel recevait le Lion d'Argent à Venise pour "Dust", et Yann Queffelec le Goncourt pour son livre, "Les noces barbares". De cette coïncidence allait naître un film puissant et inspiré, servi par l'interprétation étonnante de Thierry Frémont, consacré meilleur espoir masculin aux Césars 88 pour le film de Tacchella, "Travelling avant". Marianne Basler est moins convaincante et reste pareille à elle-même tout au long du film, alors que les autres personnages vieillissent de 10 ans. Mais de cette histoire d'amour désespérée, de cette recherche poignante de la mère, de ces personnages fragiles à la limite de la folie, Marion Hänsel a réussi un film vrai et sensible alors que l'adaptation d'un roman aussi riche ne semblait pas évidente.
LES OISEAUX, LES ORPHELINS ET LES FOUS Fiction (1h18)
Réalisateur :
Juraj Jarubisko Pays :
Slovaquie
- 1969
Second prix au Festival international du film fantastique d'Avoriaz 1973
Orphelins de l'existence, Yorick, Andrej et Marta ont décidé d'un commun accord de vivre un quotidien débridé, pour survivre à leur manière, à un monde perçu désormais comme infiniment terne et triste. Vivant dans une maison résolument délabrée et fantasque, avec une sorte de faux curé qui officie comme concierge, nos trois hurluberlus, entourés d'oiseaux multiples, s'ingénient à faire de chacune de leurs journées et de tous leurs périples aux alentours, de faramineuses fêtes spontanées où l'enchantement de la folie se dispute avec la spontanéité de l'imagination. Que ce soit en costume de marin ou en arrogante tenue de général, tête rasée pour narguer les lentes et les poux, ou habillé de pellicule, dans leur facétieux capharnaüm ou dans les rues de la capitale en plein tournage d'un film de guerre, chacun essaye de faire barrage à la médiocrité du conformisme, à l'immobilisme d'une existence sclérosée. http://www.malavidafilms.com/dvd-les-oiseaux-les-orphelins-et-les-fous-267.html
Vivre en ville est un pari risqué pour quelqu'un qui a vécu un certain temps à l'hôpital et qui a été marqué par la psychiatrie asilaire. Le fonctionnement à Paris de "Trames", réseau de communication et de solidarité entre des gens, patients en psychiatrie. Les individus, leur histoire et le groupe; entre les mots (sur la psychiatrie, le délire, les médicaments) et les activités créatrices (peinture, écriture, théâtre, vidéo, radio). Au travers des paroles dites, une émotion retenue et une sorte d'urgence vitale. Au coeur de ce reportage, la créativité des gens de "Trames" et leurs liens affirmés ou contestés avec la "folie".
Un document surprenant sur le monde méconnu des malades mentaux. Exclus de la société, ces malades sont souvent condamnés à passer leur vie dans des asiles. En 1978, le Docteur Roelandt, chef de service de l'hôpital psychiatrique d'Armentières (région lilloise) bouleverse le régime thérapeuthique qui leur est infligé. En coopération avec des médecins généralistes, des élus locaux, des assistantes sociales, des enseignants, des policiers, des artistes,... il crée de nouvelles structures adaptées et viables dans la ville afin que ses patients puissent accéder à un certaine autonomie et donner un nouveau sens à leur existence. Une nouvelle approche de la santé mentale illustrée par des interviews de malades, du personnel médical et de l'initiateur de la "psychiatrie citoyenne".
Pour les malades dits "malades mentaux chroniques", des "expériences pilotes" sont tentées en France afin de leur permettre d'en "sortir" et de trouver une place dans la société. Explications de ce travail de réinsertion sociale à travers un exemple dans le Gard. Malgré un lourd passé psychiatrique, trois personnes osent se lancer dans l'aventure du dehors. Comme la pratique alternative qui a inspiré les producteurs, le film se déroule entre deux pôles: l'hôpital psychiatrique de Prime Combe, impasse où échouent les malades chroniques de toute la région, et Sommières, lieu ouvert, ville carrefour.
Pendant dix jours, dans un hôpital psychiatrique italien, Depardon a suivi pas à pas, et la caméra à l'épaule, les errances de malades mentaux jugés, pour la plupart, irrécupérables. Admirable regard sur la folie au quotidien: sans un mot de commentaire, ce document cerne mieux que dix thèses savantes l'horreur ordinaire de l'asile de fous. San Clemente nous met sous les yeux l'immense détresse des "soignés" et le profond désarroi de leur entourage.
Un individu étrange marche sous la pluie, s'approche de la vitrine d'un restaurant où il aperçoit un piano, entre et commence à tenir un discours incohérent... David Helfgott est un pianiste prodige, né en Australie dans une famille juive, formé par un père exigeant qui a reporté sur lui toute sa frustration personnelle et l'a couvé au point de l'empêcher de partir suivre des cours aux États-Unis. David quitte finalement l'Australie pour Londres, banni par son père. Là-bas, sous la houlette de son professeur, son talent s'épanouit mais, lors d'un concert, David s'effondre. Électrochocs, séjours en hôpital psychiatrique,... jusqu'à ce qu'il soit redécouvert. Une histoire étonnante et vraie, un ton juste et sensible, un film qui raconte et qui touche sans justifier. Oscar pour Geoffrey Ruch.